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Exposition du 14 novembre 2023 au 17 mars 2024 – Château de Versailles –  Salles d’Afrique et d’Italie

 

Le château de Versailles consacre du 14 novembre 2023 au 17 mars 2024 une grande rétrospective au peintre Horace Vernet (1789 – 1863).

Intimement lié au Versailles de Louis-Philippe, l’artiste exécute pendant plus de treize ans certaines des plus belles toiles des Galeries historiques.

Ainsi, Versailles conserve aujourd’hui la plus grande collection d’oeuvres du peintre. Plus de quarante ans après la dernière exposition consacrée à Vernet, cette rétrospective d’environ 200 oeuvres est l’occasion de découvrir de nombreux chefs-d’oeuvre inédits, accompagnés d’esquisses et de dessins qui témoignent de la méthode de travail de l’artiste.

 

Un artiste à succès

Né en 1789 au Louvre, Horace Vernet est le petit-fils du peintre de marines Joseph Vernet et le fils du peintre militaire Carle Vernet. Digne héritier de la dynastie familiale, malgré un échec au Prix de Rome, il s’attire très tôt les faveurs de Napoléon Ier et de la famille impériale.

Ami de Théodore Géricault depuis les années 1810, il suit son inspiration romantique, s’initie à la lithographie et développe une manière facile et séduisante. Il devient le peintre favori du duc d’Orléans, futur Louis-Philippe.
De plus, Vernet jouit rapidement d’une certaine célébrité qui l’amène à poser pour plusieurs confrères.

L’exposition présente certains de ces portraits, parfois des caricatures, réalisés par des contemporains.

Au Salon de 1822, Horace Vernet voit ses toiles refusées et organise alors une exposition personnelle dans son atelier dont l’immense succès établit définitivement sa réputation. C’est le début d’une longue carrière.

L’exposition s’attache à montrer l’évolution stylistique des oeuvres d’Horace Vernet, passant de la fougue romantique qu’il partage avec Géricault à une peinture de bataille plus mesurée.

L’influence des voyages

L’exposition met en lumière l’importance des voyages d’Horace Vernet, notamment en Italie et en Algérie.
Nommé directeur de l’Académie de France à Rome en 1829, Horace Vernet découvre les grands modèles classiques italiens et s’essaye à la peinture d’histoire.

En 1833, il découvre l’Algérie et se concentre sur une peinture orientaliste, alternant les sujets civils, religieux et militaires. Cinq ans plus tard, il est chargé de représenter les conquêtes militaires en Algérie dans les salles d’Afrique du château de Versailles. Le temps des grandes commandes est ponctué de nombreux voyages en Orient et en Russie. Sous le Second Empire, il voit sa carrière saluée lors d’une rétrospective de son oeuvre à l’Exposition universelle de 1855. Il meurt en 1863 après avoir reçu l’insigne de Grand officier de la Légion d’honneur.

un peintre touche à tout

Peintre prolixe, encensé ou conspué par la critique, Horace Vernet n’a pas laissé ses contemporains indifférents. Cette rétrospective montre la facilité de la manière du peintre et la richesse de ses sujets de prédilection, révélant son amour pour les chevaux et la chasse, son attachement à l’épopée napoléonienne et aux faits d’armes, son goût pour la littérature romantique et la poésie de Lord Byron, ou encore pour la mise en scène de ses origines familiales.
Peintre complet, Horace Vernet s’illustre dans tous les genres, le portrait, l’histoire, la scène de genre et le paysage. L’exposition permet d’apprécier de nombreuses toiles de ce genre conservées en collections particulières.

 

Biographie

1789
30 juin : Naissance d’Horace Vernet au Louvre. Il est le
fils du peintre Carle Vernet et de Catherine Françoise
Moreau.
3 décembre : Décès de Joseph Vernet, grand-père
d’Horace et père de Carle.

1807
12 mai : Entrée d’Horace Vernet à l’école des Beaux-
Arts. Il est l’élève de François-André Vincent après avoir
étudié auprès de son père et de son grand-père maternel,
le graveur Jean-Michel Moreau.

1809
1er avril : Élimination d’Horace Vernet lors de la
deuxième épreuve du Prix de Rome.

1811
9 avril : Mariage avec Louise Pujol, rencontrée dans
l’atelier du peintre Jean-Baptiste Isabey.
Première commande officielle faite à Horace Vernet : le
Portrait équestre de Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie.

1812
Première exposition d’Horace Vernet au Salon.

1814
29 – 31 mars : Participation d’Horace Vernet à la défense
de la Barrière de Clichy dans la Garde nationale.
29 avril : Naissance de sa fille, Louise Vernet
28 septembre : Emménagement des Vernet rue des
Martyrs, où ils sont les voisins de Théodore Géricault.
7 décembre : Horace Vernet est fait chevalier de la Légion
d’Honneur pour son action à la Barrière de Clichy.

1816
Premières lithographies.

1817
Commande de la Maison du roi du Combat de Don
Sanchez de Navarre contre Mahomet ou La Bataille de
Las Navas de Tolosa.

1818
Horace Vernet ouvre un registre d’atelier pour les élèves.

1819
26 – 29 mars : Voyage en Angleterre avec Théodore Géricault.

 

1820
Février – mai : Voyage en Italie avec son père, Carle
Vernet.
L’Atelier de M. Horace Vernet, La Barrière de Clichy, Le
Soldat laboureur et La Course de chevaux libres.

1821
4 juin : Commande par la Maison du roi de Joseph Vernet
attaché au mât d’un navire.

1822
8 mai – 11 juin : Exposition personnelle d’Horace Vernet
dans son atelier de la rue de la Tour-des-Dames en
réaction à la censure du Salon. En effet, certaines de ses
toiles qui représentaient des cocardes tricolores ont été réfusées.

1823
23 avril : Achat de deux maisons rue de
la Tour-des-Dames.

1824
26 janvier : Mort de Théodore Géricault.
Exposition au Salon du Portrait de Charles X.

1830
15 août : Après l’accession au trône de Louis-Philippe,
l’ambassadeur de France à Rome démissionne ; Horace
Vernet y devient l’unique représentant de la France à Rome.

5 octobre : Horace Vernet s’oppose au secrétaire
perpétuel de l’Académie Quatremère de Quincy, sur
l’administration de l’Académie de France à Rome.

 

1833
5 mai – début juin : Premier voyage en Algérie, afin de
peindre la Prise de Bône (aujourd’hui Annaba).

1835
5 janvier : Ingres, nommé directeur de la Villa Médicis, arrive à Rome.
26 janvier : Mariage de Louise Vernet avec Paul Delaroche.

 

1836
17 juin-début septembre : Premier voyage d’Horace
Vernet en Russie où il est accueilli par le tsar Nicolas Ier.
17 novembre : Décès de Carle Vernet.
1er décembre : Naissance d’Horace Delaroche, premier petit-fils d’Horace Vernet

 

1837
31 octobre – 5 décembre : Second voyage en Algérie, à
Constantine (auj. Annaba).

1838
30 avril : Commande des tableaux pour la salle de
Constantine au château de Versailles.
23 – 31 mai : Séjour d’Horace Vernet à Berlin où il
remet le tableau de La Revue de la garde aux Tuileries à
Nicolas Ier.
30 août : Commande du plafond de la Salle des Pas
perdus à la Chambre des députés.

1839
21 octobre : Début du voyage d’Horace Vernet dans le
Levant (Égypte, Syrie, Liban, Palestine, Turquie). Il y
reste presque 6 mois.

 

1841
Publication par Vernet Du droit des peintres et ses
sculpteurs sur leurs ouvrages.
21 février : Naissance de Philippe Grégoire Delaroche,
second petit-fils d’Horace Vernet.

1842
8 mars : Horace Vernet est nommé commandeur de la
Légion d’honneur.
18 mars : Présentation à Louis-Philippe de la salle de
Constantine, composée de 14 toiles.
4 mai : Achat d’une maison impasse des Gendarmes à
Versailles.
1er juin : Second séjour en Russie
31 juillet – 20 août : Horace Vernet rentre brièvement à
Paris pour présenter ses condoléances au roi après à la
mort du prince royal Ferdinand-Philippe.
15 septembre – 19 octobre : Horace Vernet accompagne
Nicolas Ier dans diverses régions de Russie.

1843
3 août : Commande de la Prise de la Smala.
23 août – 21 novembre : Voyage à Taguin pour peindre la
Prise de la Smala.

1844
Fin mai – début juin : Voyage à Londres.
21 novembre : La Prise de la Smala est achevée.
27 décembre : Commande de la décoration de la salle du
Maroc au château de Versailles.

 

1845
Fin janvier : Réception d’une délégation de chefs arabes
dans la salle du Jeu de Paume de Versailles, alors atelier
de Vernet.
18 mars – 6 mai : Voyage en Algérie et au Maroc pour
peindre les tableaux de la salle du Maroc.
18 décembre : Mort de sa fille, Louise Delaroche.

1846
4 février : Horace Vernet reçoit les condoléances de
Louis-Philippe pour la perte de sa fille.
18 juin : La Bataille d’Isly pour la salle du Maroc est
achevée.
Mi-juillet : Voyage en Belgique et en Hollande
avec Soliman Pacha.

 

1847
19 janvier : Achèvement du plafond de la Chambre des Députés.
Juin – Juillet : Emménagement impasse des Gendarmes à Versailles.
19 – 25 octobre : Séjour en Kabylie.

 

1848
7 février : Lecture à l’Académie de la théorie d’Horace
Vernet, Des rapports qui existent entre les costumes des
anciens Hébreux et celui des Arabes modernes.
22 – 24 février : Horace Vernet combat dans la Garde
nationale contre le gouvernement Guizot.
12 avril : Nomination d’Horace Vernet colonel de la Garde nationale de Versailles.
23 – 26 juin : Horace Vernet combat avec la Garde nationale contre les insurgés.

1849
21 juillet : Horace Vernet reçoit l’ordre russe de
Saint-Wladimir, en remerciement de la Prise de Wola réalisée pour Nicolas Ier.
20 décembre : Commande du Siège de Rome.

1850
Début janvier : Voyage à Rome pour peindre Le Siège de Rome.
Août : Voyage en Angleterre pour voir Louis-Philippe en exil.
22 octobre : Démission de la Garde nationale.

1851
Mi – juin : Séparation d’Horace avec son épouse Louise.

1852
Décembre : Voyage en Algérie, alors que ses biens et sa
maison sont vendus dans le cadre de la séparation entre époux.

1853
Mars – septembre : Voyage en Kabylie, chez l’abbé
François Régis à l’abbaye de La Trappe à Staouéli.
Novembre : Horace Vernet reçoit plusieurs invitations à
la cour impériale, à Saint-Cloud et Fontainebleau.

1854
Juin – août : Voyage en Crimée pour peindre La Bataille de l’Alma.

 

1855
Janvier : Séjour en Algérie.
15 mai : Ouverture de l’Exposition universelle, une salle est consacrée à Horace Vernet.

1856
8 – 11 avril : Publication dans le journal La Presse du
Voyage de M. Horace de Vernet de l’Institut en Russie par Théophile Silvestre.
15 avril : Horace Vernet saisit le tribunal contre Théophile Silvestre, afin de protester contre l’usage des
documents privés qu’il a confiés à l’auteur. Au terme du
procès, Silvestre est jugé coupable et doit rendre à Vernet toutes les lettres prêtées.
4 novembre : Mort de son gendre, Paul Delaroche.

1857
21 avril : Horace Vernet préside l’exposition consacrée à
Paul Delaroche au Palais des Beaux-Arts.

1858
29 août : Mort de l’ancienne épouse de l’artiste, Louise.
Commande de la Prise de la tour de Malakoff par le général Mac Mahon

1859
27 avril : Second mariage d’Horace Vernet avec Marie Amélie Fuller.

1861
Fin juin – début juillet : Chute d’Horace Vernet à dos d’âne dans son domaine d’Hyères.

1862
Octobre : Dernier voyage en Algérie.
7 décembre : Horace Vernet, agonisant, reçoit le titre de Grand officier de la Légion d’honneur.

1863
17 janvier : Mort de Vernet à Paris, dans son appartement à l’Institut.

 

Parcours de l’exposition

 

La culture familiale

Horace Vernet était le petit-fils de Joseph Vernet, peintre de marines sous Louis XV, et fils de Carle Vernet, peintre militaire sous l’Empire. Certaines des oeuvres de ces artistes sont aujourd’hui conservées au château de Versailles.

Appartenir à une dynastie d’artistes a marqué toute la carrière d’Horace Vernet, à commencer par son apprentissage auprès de son père. L’artiste a peint le roman des membres de sa famille : son grand-père attaché au mât d’un navire en pleine tempête, ou son père escaladant à ses côtés les pentes du Vésuve en éruption. Horace Vernet a aussi reproduit les traits délicats de sa fille Louise.
Comme son père Carle avant lui, Horace Vernet a fourni des dessins de costumes féminins pour le Journal des modes de 1811 à 1817. Comme lui, il s’est aussi adonné à la lithographie, en même temps que Théodore Géricault ou Nicolas-Toussaint Charlet, assurant ainsi la popularité de son oeuvre.

 

VERNET romantique

Durant son apprentissage au sein de sa famille, l’artiste s’était lié avec Théodore Géricault, dont il réalisa le portrait. De
deux ans son cadet, Géricault devint son mentor en peinture. Tous deux partagèrent un goût pour les sujets d’actualité,
une prédilection pour les chevaux, comme la course des chevaux libres à Rome. Ils représentèrent tous les deux la fin de
l’Empire et le désarroi des militaires lors de la dernière campagne de Napoléon. Ils découvrirent ensemble l’Angleterre
en 1819 et Vernet retira de ce voyage des paysages d’une grande sensibilité.
Dans les années 1820, Horace Vernet fut un artiste romantique majeur, reconnu comme tel en 1822, lorsque le Salon
refusa ses oeuvres qui présentaient des cocardes tricolores. Provocateur, surveillé par la police, il ouvrit alors son atelier
pour une exposition privée qui remporta un énorme succès. Il se créa un véritable personnage dans son Intérieur
d’atelier, où il se représente opposant politique entouré des aides-de-camp du duc d’Orléans, bravache, sachant manier le
pinceau aussi bien que le fleuret.

 

Horace Vernet et le romantisme littéraire

Autour de 1820, Horace Vernet puisait son inspiration dans la littérature. Les tableaux qui en sont issus sont ceux où il
s’est senti le plus libre ; ils montrent une concentration d’énergie qui ne se trouve pas ailleurs dans son oeuvre. L’artiste ne
s’est pas tourné vers Shakespeare, malgré les traductions qui paraissaient à l’époque. Parmi les auteurs classiques, il s’est
inspiré de l’enlèvement d’Angélique d’après le Roland furieux (Orlando furioso) de l’Arioste, poème italien du XVIe siècle.
Il choisit aussi plusieurs sujets comportant des marines, tel Camoëns sauvant le manuscrit des Lusiades.

 

L’ombre de Napoléon sur l’art d’Horace Vernet

Le vendredi 6 juillet 1821, à neuf heures du soir, Horace Vernet et ses amis apprirent que Napoléon était mort le 5 mai précédent. Aussitôt, l’artiste fit allumer des cierges et drapa d’un crêpe noir un buste de l’empereur. Son entourage, qui
comptait beaucoup de proches du duc d’Orléans, exposa son atelier à une étroite surveillance policière.

 

Indiscutablement, Vernet portait une profonde vénération
pour Napoléon et sut en tirer profit en multipliant des
scènes de bivouac qui se vendaient facilement. Dans le
climat de mysticisme funèbre qui régnait dans les milieux
bonapartistes à l’annonce de la mort de Napoléon, Vernet
réalisa le Tombeau de Napoléon représentant l’empereur
terrassé sur son rocher de Sainte-Hélène battu par les flots.
Véritable rébus politique, par sa force et son intensité, le
tableau contribue à imposer l’empereur comme le dieu des
romantiques.

 

Vernet sous la restauration et la monarchie de Juillet

Les idées politiques d’Horace Vernet sont passionnantes à étudier, tant elles paraissent opportunistes. Sa famille, qui
appartenait à la franc-maçonnerie depuis plusieurs générations, accueillit la Révolution française sans état d’âme, puis se
rallia au Premier Empire. S’il accepta des commandes de la Restauration, en particulier le Portrait de Charles X, l’artiste
répondait depuis 1817 à celles de Louis-Philippe, duc d’Orléans, au point d’être considéré comme le peintre du parti
libéral d’opposition.
Vernet était à Rome au moment de la révolution de 1830 ; il réalisa plusieurs tableaux sur les journées de Juillet, à
commencer par Louis-Philippe quitte le Palais-Royal. Surtout, il répondit aux commandes de Louis-Philippe devenu roi
pour les Galeries historiques du château de Versailles.
S’il fut fidèle à la monarchie de Juillet, le peintre se rallia au peuple lors des journées de février 1848. Il était alors
capitaine de la Garde nationale à Versailles. Durant les journées de juin 1848, il prit part aux combats du côté de l’armée
régulière répressive, comme le montre Barricade dans la rue Soufflot. Acquis désormais aux idées les plus réactionnaires,
il réalisa en 1850 une allégorie politique intitulée Socialisme et Choléra.

 

 

La chambre turque

En mai 1833, Horace Vernet, alors directeur de l’Académie de France à Rome, se rendit pour la première fois en Afrique
du Nord, accompagnant l’armée française dans les territoires nouvellement conquis d’Algérie. Dès son retour, l’artiste,
fasciné par un Orient qu’il avait jusqu’alors seulement imaginé, se fit aménager une petite pièce de goût oriental au
sommet d’une tour de la Villa Médicis, connue depuis sous le nom de Chambre turque.
Exemple précoce d’intérieur d’inspiration islamique en Italie, le décor combine plusieurs éléments arabo-andalous.
Vernet fit ajouter une inscription coranique à la fonction protectrice : « Allah ! Point de divinité à part Lui, le Vivant,
Celui qui subsiste par lui-même. Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent ».
Les travaux furent réalisés par des artisans romains, avec des matériaux locaux. Les parois furent revêtues de faïences
colorées de la manufacture napolitaine Giustiniani, fidèlement reproduites par Alfred de Curzon en 1850.

 

Impressions d’Orient

Pour Horace Vernet, l’Orient fut d’abord représenté
par les oeuvres rappelant l’expédition d’Égypte avant
de devenir un imaginaire nourri par la poésie de Lord
Byron.
À partir de 1833, les séjours d’Horace Vernet en
Afrique du Nord sont à l’origine des grandes toiles des
salles d’Afrique du château de Versailles. Ils ont aussi
donné cours à une inspiration civile, plus fantaisiste,
comme la Jeune Algérienne au faucon ou La Chasse
au lion. La décoration des trois salles d’Afrique – salle
de Constantine, salle de la Smala et salle du Maroc –
constitue le dernier chantier d’Horace Vernet au château
de Versailles dont fait partie La prise de Tanger, tableau
inachevé, présenté pour la première fois au public lors de
l’exposition.
Enfin, c’est lors de ses nombreux voyages en Afrique
qu’Horace Vernet élabora une théorie originale sur
la peinture religieuse, et plus particulièrement sur
la représentation des personnages. L’artiste la mit en
application sur plusieurs de ses oeuvres, notamment
Agar chassée par Abraham. Présentée à l’Académie des
Beaux-Arts en 1848, cette théorie fit scandale.

 

Les salles d’Afrique

L’aménagement des salles d’Afrique a commencé en 1837 sous la direction de l’architecte Frédéric Nepveu.
Louis-Philippe entendait commémorer la conquête de l’Algérie où s’étaient illustrés ses fils. La décoration des trois
salles, Constantine, Smala et Maroc, fut confiée à Horace Vernet qui réalisa plusieurs grands tableaux, aidé par
Éloi-Firmin Féron pour les voussures.
Aucun programme global n’a jamais existé : après le siège d’Anvers en Belgique en 1832, les sujets africains ont été
décidés au fur et à mesure de l’avancée des troupes françaises.
Tout fut peint en six ans. Chaque commande fut précédée d’un voyage sur place afin de donner un cadre véridique
aux toiles de Vernet. L’artiste réalisa plusieurs dessins de paysages qu’il reprit en atelier. S’il se rendit sur place après les
combats de Constantine et de Taguin pour réaliser des dessins préparatoires, il travailla aussi d’après les relevés effectués
par les ingénieurs et dessinateurs de l’armée.
Une fois son cadre mis en place, Vernet disposait au premier plan des accessoires pittoresques qu’il avait rapportés de ses
voyages, des ballots de marchandise, une théière, un pain de sucre. Ces objets passent parfois d’une composition à une
autre. Les dessins sont mis au carreau afin de faciliter le report de la composition sur la toile.
Les oeuvres sont réalisées à Versailles, dans la salle du Jeu de Paume, que le peintre utilisait alors comme atelier, puis
exposées au Salon avant d’être définitivement installées dans les salles d’Afrique.
Pour ces formats immenses, l’artiste représenta davantage la vie militaire et la vie de bivouac que les batailles. Les figures
peintes par grands aplats, selon une technique appropriée, se découpent avec force sur le paysage. L’artiste a remplacé la
grandeur et le drame par la légèreté, le pittoresque et le trivial qui trahissent autant son exaltation romanesque que son
racisme.
Vernet reçut aussi des commandes de tableaux de chevalet et des commandes sur la guerre de Crimée. Sous le second
Empire, sa manière devient plus dramatique.

 

Portraits

 

Le portrait pratiqué par Horace Vernet dès les années 1815 est d’abord minutieux et pittoresque avant de devenir
romantique et sensible. Ses modèles, d’abord peints en petit format, et d’une manière précieuse, prennent par la suite
des poses plus variées qui laissent suggérer leur tempérament. Le peintre aimait aussi représenter ceux qui lui étaient
proches, en bustes, en une seule séance de pose, d’un seul jet de pinceau, comme dans le Portrait de Mademoiselle Mars.
Mais l’artiste répondit aussi à des commandes d’amateurs et d’amis, comme le Portrait de Jean-Georges Schickler,
qui a figuré au Salon de 1827, ou le Portrait du baron Desgenettes daté de 1828. Dans les années 1830-1840 à Paris,
parallèlement aux portraits d’artistes et de musiciens, il réalisa des commandes importantes comme le Portrait de frère
Philippe réalisé en 1844.

 

 

Italie !

 

Rome au XIXe siècle était à bien des égards la ville des
étrangers. Destination du Grand Tour, elle restait le but
idéal du voyage de riches européens, tout en restant une
ville pittoresque. Cette combinaison a dû plaire à Horace
Vernet, autant attiré par les figures populaires que flatté
par les personnalités qui lui commandaient leur portrait.
S’il fut un touriste lors de son premier voyage en 1820,
Vernet devint un membre officiel de la communauté
française en dirigeant l’Académie de France à Rome
de 1829 à 1834, une des situations les plus enviées que
puisse rêver un artiste. Il défendit les pensionnaires
avec enthousiasme contre le secrétaire perpétuel de
l’Académie des Beaux-Arts, Quatremère de Quincy, et
l’administration parisienne. Mondain, Vernet organisait
des soirées le jeudi soir à la Villa, fréquentées par
Mendelssohn, Cornelius, Overbeck, Léopold Robert,
Victor Schnetz, Orsel, Adolphe Roger, la Malibran ou
Stendhal, consul de France à Civitavecchia de 1831 à
1842.
La Villa Médicis était un lieu très fréquenté et son
directeur était souvent sollicité, néanmoins, il travaillait
beaucoup. Sa fonction lui permit de multiplier les
portraits d’artistes et d’amateurs européens dans leurs
intérieurs ou devant des paysages emblématiques.
Après l’influence de l’art anglais, en particulier celle
de Lawrence, dans les années 1820, s’est fait sentir
l’influence d’Ingres, et surtout celle de Raphaël, comme
dans l’ambitieux Portrait de la marquise Cunegonda
Misciatelli avec son enfant et une nourrice.

 

Sur les pas de louis-philippe et d’horace vernet

 

Le versailles de louis-Philippe

Héritier de la famille d’Orléans, Louis-Philippe a peu
d’histoire commune avec le Versailles de l’Ancien
Régime. Toutefois, dès son accession au trône en 1830,
il marque son intérêt pour le palais et s’emploie à le
transformer en musée national, dédié à « toutes les
gloires de la France ». Son but est certes de réconcilier
les Français, mais surtout d’inscrire son règne dans
l’histoire nationale.
De 1834 à 1847, Louis-Philippe fait près de 400 visites à
Versailles, suivant le chantier avec beaucoup d’intérêt,
donnant ses instructions et réglant jusqu’au moindre
détail.

quand versailles devient un musée

Dès lors, deux Versailles cohabitent. La résidence royale
dans le corps central, avec les Grands Appartements
restaurés et remeublés, qui conservent leur appellation
d’origine. L’ancienne monarchie est surtout évoquée
dans l’appartement du roi, dont la chambre marque le
point d’orgue de la visite.
Ailleurs, dans les ailes du Nord et du Midi, des chantiers
considérables sont entrepris. Louis-Philippe crée des
Galeries historiques d’une extrémité à l’autre du palais,
ponctuant ainsi le parcours d’importants ensembles
iconographiques : la galerie des Batailles, de Tolbiac à
Wagram, la salle des États Généraux et la salle de 1792,
la salle du Sacre de Napoléon à laquelle répond la salle de
1830 à la gloire du nouveau monarque, et enfin les salles
des Croisades et les salles d’Afrique restées inachevées en
1848 à la chute de la monarchie de Juillet.
Pour la mise en oeuvre de ce projet, l’architecte du palais,
Frédéric Nepveu, s’inspire du vocabulaire décoratif
des Grands Appartements, mais utilise de nouvelles
techniques, en particulier la structure métallique qui
permet l’éclairage zénithal de la monumentale galerie
des Batailles.
Le programme iconographique appuie le discours
politique de Louis-Philippe qui a hérité de son éducation
une conscience aiguë de l’histoire, avivée par la
Révolution française et par la sensibilité romantique de
l’époque. Les nombreuses oeuvres commandées (plus
de 3 000 sur les près de 6 000 rassemblées à Versailles)
illustrent ainsi une histoire événementielle, ponctuée de
noms glorieux. Le roi fait revivre les héros de la France
depuis Pharamond jusqu’aux événements les plus récents
de sa prise de pouvoir et de son règne.

 

En transformant l’ancienne résidence des Bourbons en
musée ouvert à tous, Louis-Philippe confirme sa vision
didactique d’un palais au sein duquel les tableaux se
lisent comme un livre d’images, en accompagnement
d’un discours politique.
Les Galeries historiques furent inaugurées par
Louis-Philippe le 10 juin 1837. Cinq mille invités se
pressèrent à une fête magnifique, avec visite des galeries,
banquet dans la galerie des Glaces et spectacle à l’Opéra.

 

Le Grand Trianon, la résidence privée de la famille

En 1835, Louis-Philippe décida d’installer un
appartement au Grand Trianon pour surveiller les
travaux de transformation du Château en musée. Depuis
les remeublements réalisés par Napoléon en 1810, les
lieux n’avaient pas changé. Le Roi ordonna de nombreux
travaux et réaménagements pour loger dans le petit
château avec les autres membres de sa famille et leurs
suites.
Jusqu’alors simple résidence d’été, le Grand Trianon
fut transformé en château fonctionnel, selon le goût de
l’époque. Comme dans toutes ses résidences, Louis-
Philippe souhaita y apporter le confort le plus moderne.
Il fit ainsi creuser les fondations du bâtiment et créer des
souterrains où furent aménagés les services nécessaires
au fonctionnement d’une résidence royale. Dans
ces sous-sols, on installa notamment des calorifères
chauffant tous les salons par des bouches grillagées
placées devant les fenêtres. On y déménagea également
les cuisines du château.

 

Des appartements d’apparat furent aménagés pour Louis-Philippe et Marie-Amélie et une partie du palais transformée pour accueillir leur nombreuse famille. Par exemple, on aménagea dans la chambre et
le salon du premier appartement de Louis XIV un vaste
salon de famille, permettant de se retrouver le soir. De
grandes tables de famille y furent placées. Dotées de
tiroirs numérotés, elles permettaient aux princesses,
qui en possédaient les clés, de déposer leurs travaux
d’aiguilles ou leurs livres. Dans le salon adjacent, on
installa un grand billard d’acajou à l’usage des fils du
souverain et des hommes de la suite. La galerie, quant
à elle, devint une vaste salle à manger. Si le mobilier
installé sous l’Empire fut conservé, les appartements
sont réaménagés et complétés avec des éléments plus
confortables, comme des sièges capitonnés ou des chaises
légères, favorisant les réunions familiales.
À l’arrière de cette enfilade de salons d’apparat se situent
les appartements des filles de Louis-Philippe. Le décor
y fut largement repensé : des soieries aux teintes vives,
bleues pour la plupart avec des rosaces dorées, ornaient
les murs.

 

Un appartement de travail pour Louis-Philippe

Louis-Philippe avait par ailleurs besoin d’un
appartement de travail. Il fit alors aménager plusieurs
pièces s’articulant autour d’une vaste chambre-cabinet,
aux murs tendus d’une cotonnade fleurie très élégante.
Cette pièce servait à la fois de pièce de repos et de travail
avec à proximité une bibliothèque et l’appartement du
secrétaire du souverain. L’ameublement de la chambre cabinet
a été restitué en 2021 (sur la base de l’inventaire
de 1839), les murs sont depuis lors tendus d’une toile
Perse fond blanc à gros bouquets, réimprimée d’après des
éléments conservés.

 

Ce choix d’un textile présentant dix couleurs imprimées
à la planche est sans doute un écho de l’anglomanie de
Louis-Philippe, celui-ci ayant pu voir lors de son exil en
Angleterre des toiles de ce type qui rencontraient alors
un grand succès.
Assez simple et faisant la part belle à l’acajou, le
mobilier est tiré des réserves du Garde-Meuble, comme
la longue bibliothèque basse, localisée aux Tuileries
avant la Révolution. Il est complété par des éléments
contemporains de Louis-Philippe, comme les chaises
confortables capitonnées ou le lit de repos à coffre, placé
sur le mur gauche, qui présente un système gigogne
permettant de se déplier.
Sur les murs sont aujourd’hui
présentés de nombreux tableaux
évoquant la vie de Louis-Philippe,
son entourage ou les demeures
qui lui étaient chères. Une salle de
bain jouxte cette chambre.
Dans l’ancien appartement
du secrétaire du roi, situé
à immédiate proximité de
l’appartement privé de Louis-
Philippe, une pièce évoque
l’ameublement des appartements des fils du souverain,
qui logeaient alors dans l’aile de Trianon-sous-Bois
(largement transformée dans les années 1960 par le
général de Gaulle).
Le Grand Trianon a été utilisé par Louis-Philippe et sa
famille jusqu’à la fin du règne pour de simples visites
ou de courts séjours. La dernière venue du roi date de
février 1848, durant son trajet vers l’exil.