Niché dans son écrin de verdure surplombant la vallée de l’Aulne, le château de Trévarez bouscule les codes du patrimoine. Avec son allure de conte de fées technologique, ses cicatrices à nu et son parc somptueux, l’édifice élu à la 3e place des monuments préférés des Français en 2024 est aujourd’hui l’un des sites les plus visités de la région… et ce n’est pas un hasard.
Un rêve de pierre et de progrès
En 1893, dans le contexte trépidant de la Belle
Époque, James de Kerjégu, figure politique
influente, décide de bâtir sur les terres de
ses ancêtres un château à la hauteur de ses
ambitions, et de celles qu’il nourrit pour sa fille
Françoise. Pour cette résidence exceptionnelle,
témoin de sa réussite sociale et destinée aux
parties de chasse et aux grandes réceptions, il
fait appel à Walter-André Destailleur, architecte
parisien réputé. Le résultat est grandiose :
une demeure qui mixe les styles avec audace.
Renaissance, gothique, Art nouveau… : Trévarez
ose tout.
Mais c’est dans ses entrailles que se cache
sa véritable révolution. Chauffage central,
électricité, téléphone, ascenseurs, et même
chauffe-serviettes… rien n’est trop moderne
pour cette demeure hors norme, construite en
pleine zone rurale, bien loin des salons parisiens.
À l’époque, c’est tout bonnement un OVNI
architectural.
Les travaux durent 14 ans, et leur coût est colossal :
cinq millions de francs or. Plus de 100 pièces,
30 chambres, 13 salles de bains, 4 piscines,
un mobilier raffiné et des finitions jusqu’aux
gouttières décorées… Le tout dans un parc de 85
hectares, aujourd’hui classé parmi les cinquante
plus beaux jardins de camélias au monde.
La Seconde Guerre mondiale viendra briser cette
parenthèse enchantée. Réquisitionné par les
Allemands, Trévarez est bombardé en 1944. Son
grand salon s’effondre. Il ne sera jamais reconstruit,
laissant apparaître la structure métallique du
bâtiment, en clin d’œil à la tour Eiffel. Si un pan de
rêve s’écroule, l’âme du château, elle, résiste
Cette âme, les visiteurs la redécouvrent
aujourd’hui grâce à l’exposition permanente
« Bâtir un rêve » : une plongée dans l’univers
foisonnant de la Belle Époque. Entre ambiance
feutrée de la bibliothèque, faste des salles de
réception et reconstitution virtuelle du grand
salon détruit, c’est tout le château qui reprend
vie, pièce par pièce.
Une icône finistérienne
Trévarez, c’est aussi une histoire d’ancrage.
Celle d’un château breton dans l’âme. Les
pierres viennent de Scaër, de Brest ou encore de
Couëron. Le décor, lui, n’oublie pas ses racines :
une femme en coiffe bretonne et un joueur de
biniou ornent les corniches. Et bien avant les
dorures, le domaine a connu les labours : au XIXe
siècle, le père et l’oncle de James y fondent l’une
des premières fermes-écoles de France. Objectif :
former les jeunes agriculteurs aux pratiques
modernes. Une autre forme d’avant-garde
C’est à la demande de James
de Kerjégu, président du Conseil
général, que fut construit l’Hôtel de
la Préfecture de Quimper entre 1906
et 1909. Les plans de l’architecte
Adolphe Vally rappellent le style
néogothique du château de Trévarez.
Un château qui vibre toujours
Loin d’être un musée figé, ici, le patrimoine est vivant, incarné. Chaque saison, le
domaine s’anime : festivals, photographies dans le parc, rendez-vous botaniques,
pique-nique Belle Époque…
Le temps fort de l’année est résolument « Noël à Trévarez » : un moment suspendu,
où le château s’illumine et renoue avec la magie de ses débuts. On y vient pour rêver
et l’on repart, un peu changé.
La chapelle Saint-Hubert
À l’intérieur, découvrez ses vitraux et son architecture.
Aux alentours, domaine datant de différentes époques : manoir, chenils, étang..