jeu. Nov 21st, 2024

Un peu d’hier…

S’il est vrai que Paris est la ville des belles tables et que les belles tables y font la ville, il en est quelques-unes qui le sont un peu plus et la font un peu mieux. On dit d’elles qu’elles sont des légendes.

Elles en ont le parfum et ce petit génie à traverser le temps comme le miroir. Laurent du côté de ces rares élues. Au livre d’or de la vie parisienne, son nom file aux premières pages, aux premières lignes. Lignes fleuries, parfumées depuis que lesChamps-Élysées s’invitent au jardin du carré Marigny. Lignes heureuses, légères, enchantées à partager le joli conte d’un relaisde chasse fétiche de Louis XIV devenu folle guinguette à la Révolution puis café du Cirque avant, un siècle durant, de faire galoper le tout Paris mondain et de régaler la planète aux étoilesd’un de ces grands restaurants dont ce très cher VIIIème arron-dissement avait le chic et le goût. Drôle de valse longtempsprolongée. Celle d’une table à mémoire, d’une table dans l’histoire qui, un certain soir, s’effaça tendrement comme parfois les stars. Ces dernières saisons, l’envie était trop forte, l’occasiontrop belle. L’adresse s’impatientait de tourner les pages inédites d’une reprise tant attendue. Promesse tenue en septembre 2023 avec, pour en signer l’audace, le duo Laurent de Gourcuff, et le groupe Paris Society, associé au grand chef Mathieu Pacaud.Les lieux se découvrent une nouvelle énergie, l’appétit un nouvel élan, Laurent signe son grand retour puisqu’après tout, il n’est de légende que vivante.

Beaucoup d’aujourd’hui…

Il est là, piaffant de retrouver la scène, pressé de vous revoir. Plus qu’un décor, un orgueil parisien.

Sûrement parmi les dix plus beaux de la ville. On l’avait quitté au passé composé, Cordelia de Castellane, Directrice Artistique de Paris Society, nous le rend à l’indicatif présent. Dans sa superbe, sa douce folie, son diable de panache.
Une « affaire de cœur » entre la décoratrice et le restaurant. « Beaucoup de souvenirs partagés, beaucoup d’émotions.

Le lieu est un chef d’œuvre de ce XIXème échevelé, éclectique, joyeux, précieux. Il convenait surtout de ne rien dénaturer, juste réveiller la féerie, renouer à l’éclat et à la lumière, lui redonner ce goût du bonheur qui est le sien. »

 

 

Les salles du restaurant, la première intime dans ses façons de salon, la seconde dans la confidence d’un wagon immobile, la troisième spectaculaire à tendre
ses colonnades et retrouver, derrière l’estrade, son petit paradis de jardins. Laurent révèle son étoffe, l’ornement reprend toute sa place. Les plafonds à nouveau fiers de leur hauteur, les murs spirituels dans leur pastel, les murs dans le frisson de leur fine peinture, les fers forgés qui ondulent, l’osier qui courbe aux fauteuils, les moquettes soudain flamboyantes. Tout est faste, courbe et privilège. Le grand escalier accompagne, l’étage prolonge aux tours et détours des salons, petits et grands, tous craquants à s’offrir jusqu’aux balcons.

On perce alors le rose de la fameuse façade, une fontaine chante, des fleurs enchantent, les Champs n’ont jamais si bien porter leur nom, Laurent redevient son hôtel si particulier.

La gourmandise prend tout son sens

Au menu ! Longtemps que les deux petits mots de l’expression n’avaient si fortement résonnés tant le menu prend sa pleine revanche.

Menu vrai de vrai, complet, opulent, varié, épanoui, ouvert à nous donner le choix, libre à nous le laisser.
Mathieu Pacaud compose un modèle du genre. Mieux qu’un appétit, un tempérament à la parisienne avec le sex-appeal canaille, le grand style décomplexé, les produits fiers d’être nobles. Voilà que la gourmandise n’est plus un mot honteux et trouve tous les mets pour se dire. Les amuses-gueules, les terrines du moment, les marinades, les potages, les hors d’œuvres, les poissons et viandes, le train de la rôtisserie, les fromages et desserts en chariots. À chaque plat, une touche, un style, la rencontre parfaite entre le grand chef et la belle table.

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Mathieu Pacaud éclaircit les classiques, raffine la tradition

Crudités à l’aïoli soufflé, Saumon fumé en aspic de baies roses, Artichauts poivrade et grecque à la coriandre, Velouté de poivron à l’émulsion de verveine, Brioche mousseline au caviar Golden,
Cabillaud confit sauce vierge, Filet au poivre, Gigot d’agneau de lait à la moelle et marjolaine, Sole meunière beurre de sarrasin, on en passe qu’on est sûrement pas prêt d’oublier dont le trio de classiques maisons revus nouvelle vague, incontournable

Salade de homard bleu, langoureuses Langous tines à la feuille de basilic, affriolante Araignée de mer rafraîchie à la gelée de fenouil. Sans oublier l’incroyable chariot révélé au moment du dessert.

Quel temps fait-il à la cave ? Grands bordeaux, beaux bourgognes, hautes bulles !

Tellement demain…

C’est l’apanage des adresses romanesques d’avoir ce talent à, s’inventer une suite.
Celle de Laurent, c’est d’abord un désir.

L’envie de la belle ville lorsqu’elle retrouve la belle vie. Vivre pleinement le jour, sortir follement la nuit. Une table au cadran de ses beaux quartiers : le Triangle d’or, réveillons-le !
Tout a été imaginé, inspiré, peut-être même fantasmé, pour l’escorter dans ces deux temps.

Laurent midi, Laurent minuit…

Au déjeuner, le restaurant réveille ce qui en fait le privilège comme le secret.

Un lieu plébiscité par le pouvoir; rendez-vous assumé des grands mondes lorsque la politique croise à la diplomatie, à l’art et au business. Tout a été repensé pour que la discrétion retrouve à s’y affairer. Les tables cultivent la bonne distance, le service précède les attentes, l’entre soi se regagne des saveurs. Au dîner, même lieu, autre climat. Laurent se gagne un glamour, une nocturne. Le voici dans ses heures bleues. Les lumières tombent en même temps que la nuit, les couverts se rapprochent, le bar caché devient complice, les verres se remplissent, le service sort les beaux gestes, les nourritures suivent, légères, plus amples, toujours justes avant que la musique ne s’installe. La salle chante, rit, danse, soudain plus sonore, toujours plus vivante. Si le premier talent d’un restaurant, c’est aussi son public, celui de Laurent n’en manque pas. Le jour toujours et désormais le soir lorsque l’adresse devient la plus belle conquête des femmes.